Présentation


Depuis 1952

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1952 - Coudenberg

Sur une idée d'Alain Viray, son gendre, Germaine Schepers décide de créer une galerie d'art dans le show room de son mari qui était décorateur et installé au Coudenberg. Jos Albert est le premier artiste à exposer en individuel.


 1956 - rue de la Madeleine

La construction de la jonction Nord-Midi et la réalisation du nouveau Mont des Arts les obligent à quitter le Coudenberg début mai.

Germaine Schepers a trouvé un nouvel emplacement à quelques dizaines de mètres au 45 rue de la Madeleine. De mai à septembre, il n'y a pas d'expositions; les travaux d'aménagement sont en cours et le déménagement est prévu pour la fin de l'été.

C'est Claude Lyr qui inaugure en octobre les nouvelles installations.


1977 - 25e anniversaire - "60 artistes de 1952 à 1977"

Pour fêter ce 25e anniversaire, une exposition de groupe rassemblera 60 artistes et quatre critiques d'art - Paul Caso (Le Soir), Stéphane Rey (La Libre Belgique), Jean Pigeon (La Libre Belgique) et Jacques Collard (Pourquoi Pas) - choisissent pour l'invitation de parler d'une oeuvre particulière exposée aux cimaises.

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1979 - 

Disparition de Madame Schepers en juillet de cette année. Sa fille Andrée qui était déjà sa collaboratrice reprend le flambeau en solo.

 


1992 – L’art en fête – 40e anniversaire

Fêter la figuration sous toutes ses formes, rappeler constamment que l’art est multiple dans ses expressions et que les créateurs ont le droit de s’avouer suivant leur tempérament naturel, tel a été, depuis 40 ans, l’objectif constant dans ses choix de la galerie Albert. Ainsi est-il vain de prétendre que l’art se doit, pour être fécond, de suivre nécessairement les chemins d’une recherche plastique allant jusqu’au dérisoire de la forme et du contenu.

Au-delà des théories, l’artiste reste maître de son imaginaire qui atteint à l’universel dès qu’il forge son œuvre avec une vision agrandie et une technique maîtrisée.

La galerie Albert 1er, d’abord sous la direction de Germaine Schepers, personnage s’il en est, et aujourd’hui sous la férule souriante mais ferme de sa fille, a choisi délibérément d’ouvrir les fenêtres de la figuration prise dans le sens le plus large. Depuis 1952, les cimaises se sont peuplées de compositions paysagées, de visages, de corps mais aussi de rêves intérieurs, traduit par la palette, le trait et la forme. Réalisme, réalisme magique et poétique, néo-réalisme, impressionnisme, expressionnisme, fantasmagie, fantastique, surréalisme et même l’art si particulier du cartoon et de l’humour ont trouvé place dans sa programmation toujours en quête d’échanges humanistes. Les choix d’Andrée Schepers nous incitent à nous rappeler combien l’ouverture, le dialogue entre les êtres, l’interrogation métaphysique sont de hautes valeurs qui touchent au vif l’enthousiasme du spectateur et le talent des créateurs les plus authentiques.

La grande presse culturelle française et américaine se pose aujourd’hui une question essentielle : celle du retour de l’artiste dans le giron de la sensibilité collective. Vaste préoccupation à l’échelle mondiale. Ainsi, la galerie Albert 1er, en toute liberté et en toute volonté d’indépendance à l’égard des modes, se propose-t-elle d’y répondre avec le souci d’être, dans la continuité, un foyer vivant et en perpétuelle mouvance de l’art et de l’humain.

Alain Viray
AICA, Juillet 1992 d'après un entretien avec Andrée Schepers 


2002 - Cinquante ans déjà !

Il est des anniversaires plus légers que d’autres, plus joyeux, qui ne se contentent pas d’être jeux de chiffres nous poussant vers un terme inéluctable. Les cinquante ans de la Galerie Albert 1er sont de ceux qui égrènent les notes de la vie en noms d’artistes et en images. Dix lustres d’aventure artistique ! Que de souvenirs, de rencontres palpitantes, d’enthousiasme !

Un demi-siècle d’échanges avec les créateurs, au cœur de l’art, à mêler les genres, à s’interroger sans cesse à propos d’un discours sur l’art qui occulte trop souvent l’œuvre. Rares sont les galeries d’art dotées d’une telle longévité. Celle-ci ne s’explique qu’en terme d’engagement profond. Celui de Germaine Schepers tout d’abord, à qui revient l’initiative, d’après une idée d’Alain Viray. Ouvrir une galerie située au Coudenberg, au numéro 44, trouver un nom, un vocable qui frappe, qui puisse s’imprimer dans les esprits tout en étant chargé de sens, se révèlent toujours entreprise difficile. La localisation de la galerie, la présence de la statue du Roi chevalier, le chantier de construction d’une bibliothèque royale, plus familièrement désignée « Albertine », ont imposé un nom qui malgré des déménagements successifs, a conservé sa raison d’être et sa force. Très abruptement, Andrée Schepers est entrée « en galerie », comme en religion d’art. Dès 1968 elle a commencé à seconder une mère toujours impérieuse mais à la santé plus fragile. Pour assurer ensuite la relève en 1979 … et la pérennité.

Comment construire l’avenir d’une galerie d’art ? Quel rôle jouer sur une scène difficile ? Comment s’inventer pour se vivre sur le long terme et garder aujourd’hui un dynamisme d’explorateur ? 1952 ! Cela semble si loin déjà. Pour certains cette date évoque des souvenirs de jeunesse, d’une période où l’on réapprenait à vivre au sortir de la guerre. Pour d’autres, parmi les jeunes créateurs et le public, 1952 n’éveille qu’une image en noir et blanc un peu jaunie d’un passé inaccessible parce que non vécu. C’était l’époque de la Jeune Peinture, de nouvelles luttes en faveur d’un art toujours à inventer, d’une rupture avec un passé douloureux. Si le temps a laissé des rides au coin des yeux, par contre, il n’atteint pas l’œuvre des artistes. Car les noms qui forment la trame de l’histoire de la Galerie Albert 1er écrivent aussi quelques très belles pages de l’histoire de l’art en Belgique.

Un choix s’est imposé d’emblée. Par goût et non par opportunisme. Celui d’une figuration, non limitative, et que bien des coups de pinceau mettent à mal pour dévier vers un univers exclusivement pictural. « En un certain ordre assemblées » disait Maurice Denis à propos des couleurs sur une toile. En dépit du sujet, car figuration ne dit pas exclusivement visage. Paysages, villes naïves, natures mortes, animaux sombres ou moqueurs, corps sublimés ou tourmentés ont occupé les cimaises.

Le coup de cœur, l’instinct, la rencontre humaniste avec le créateur guident le choix. Beaucoup d’appelés et peu d’élus. Mais pour ceux-là, quel soutien ! Car la Galerie Albert 1er se vit dans la fidélité. Jos Albert l’inaugura, immédiatement suivi de Gustave Camus. Le ton était donné. Un artiste confirmé pour convaincre et un jeune talent qui venait de remporter le prix de la Jeune Peinture pour accompagner l’aventure de l’art et offrir à la génération montante les moyens de s’imposer. A l’écart des embrasements financiers, des modes tapageuses, des chemins de la provocation qui deviennent parfois le but ultime des artistes, la Galerie Albert 1er rejoint dans ses divers rôles les noms prestigieux des Durand-Ruel, Vollard ou Kahnweiler.

Le fil de l’amitié et de la confiance noué avec les créateurs permet de suivre leur progression, de les accompagner dans leurs succès, d’accueillir la diversité de leurs expériences. Pour Rik Slabbinck, la Galerie Albert 1er deviendra, à Bruxelles, l’unique lieu de présentation de son travail. Cette exclusivité, voulue par le peintre, traduit la qualité des engagements réciproques. Armand Vanderlick, Henri-Victor Wolvens, Claude Lyr, Luc Perot et tant d’autres constituent un noyau autour duquel gravitent des artistes de passage dont le charme enchante. Le public y trouve de quoi renouveler son intérêt. Et la galerie assume un autre rôle. Pour séduire, il faut susciter sans cesse l’intérêt, ne pas laisser le spectateur s’endormir dans la quiétude de ses certitudes. Il faut oser, confronter, contraster, explorer des chemins plus ardus en apparence, s’ouvrir à des genres plus rares, plus discrets, plus difficiles à défendre, mais guidés par le cœur.

On n’en finirait pas d’énumérer les « premières ». Hors du champ de la peinture, la galerie a prêté son espace à des sculptures qui y trouvent une respiration à leur mesure, où le spectaculaire côtoie l’intimisme. Bientôt d’autres expériences ont envahi les lieux. La présentation des tapisseries d’Edmond Dubrunfaut, de Mary Dambiermont, aurait pu n’être que tentative oubliée. Peu à peu, un public s’est formé à des expressions plus difficiles.

Des événements émaillent aussi ce demi-siècle. Nombre de livres présents sur la table de travail ont vu leur parution célébrée lors d’une exposition. Hors ses murs, « Albert 1er » a inauguré des œuvres monumentales – autre face de son éclectisme. Andrée Schepers raconte une folle balade dans les Marolles, pour entrer en fanfare dans la station de métro Louise transformée par la tapisserie, les céramiques et les émaux sur acier d’Edmond Dubrunfaut. Et une après-midi à Antoing autour d’un signal en céramique où se croisent effectivement les chemins et les hommes. Une légitime fierté l’anime quand elle parle de cette biennale de Venise 1986. Grâce à son intervention, cinq de « ses » artistes y avaient été retenus : Claude Génisson, Jane Graverol, Claude Lyr, Aubin Pasque et Jean Ransy. La même fierté pour dire l’affection, l’estime éprouvées pour tous ces êtres fragiles et forts que sont les artistes.

Immense privilège aussi, la galerie d’art offre un espace de vie avec les œuvres. Le temps s’y écoule dans un dialogue, une communication constante qui suscitent l’intimité avec l’âme de l’artiste. Que ces moments profonds et inspirés ne nous fassent pas oublier que l’histoire ne s’arrête pas. Que l’aventure se conjugue au futur, que la création transcende et rapproche les hommes, que l’avenir de l’art écrira encore quelques-uns de ses chapitres à la galerie Albert 1er. Bon anniversaire et bon vent !

Jacqueline Guisset - Docteur en Philosophie et Lettres - Histoire de l’Art


2012 - Jivko, l’artiste du 60e anniversaire !

1952 était hier l’ouverture d’une galerie d’art si légitimement fière de sa longévité et des choix qui lui ont permis de traverser 6 décennies. Le goût pour l’art figuratif, pourfendu de coups de pinceaux hardis se jouant exclusivement des matières et des couleurs, lui fait un vêtement identitaire. Encore faut-il comprendre que figuration ne signifie pas seulement narration et encore moins réalisme simpliste. Le leitmotiv serait plutôt humanisme, terre d’accueil aux peintres et sculpteurs actuels qui, comme Diogène, cherchent toujours l’homme dans un monde qui l’oublie trop souvent.

Aussi fallait-il ouvrir ce lieu de fête à un artiste d’aujourd’hui soucieux de cette quête. D’origine bulgare et naturalisé français, couvert de prix prestigieux, nous vient Jivko (Stara Zagora, 1963) sculpteur et digne héritier des artisans thraces, bronzier à la manière des plus célèbres antiques.

Créations de petit ou de grand format, ses œuvres frappent par leur monumentalité. De blocs tranchés, de plaques gaufrées d’alvéoles qui se feront grilles métalliques, de petits morceaux patiemment ajoutés et gardant la trace des doigts, la cire d’abeilles, matière douce, a fondu en des êtres, des animaux, des objets de bronze dur et résistant. Au contraste des matières répond un apparent déséquilibre qui se veut inquiétant, ludique ou humoriste mais témoigne toujours d’une force éminemment maîtrisée.

Habitué depuis le cubisme et Zadkine à voir des hommes déchiquetés, notre regard se laisse prendre à ces figures à l’anatomie précise et délicate malgré les plans abrupts, les vides s’articulant et rappelant que nous sommes plaies et douleurs autant que savante construction.

Visages graves et tendus même dans les situations burlesques n’expriment que douceur et nostalgie dans de magnifiques dessins à la chair pleine. Plus nerveuses dans les taches d’encre griffant la pierre, des lithographies prolongent une pensée forte qui raconte en images d’aujourd’hui les mythes d’hier et de toujours.

Quel bel invité pour cette prestigieuse célébration !

Jacqueline Guisset - Docteur en Histoire de l’art


 

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